Amina, une jeune militante tunisienne de Femen, est menacée de mort pour s’être affichée seins nus. Réaction de l’écrivaine libanaise Joumana Haddad, de la perplexité à la colère.
Source:Les Nouvelles /News
Je dois avouer que l’approche de Femen – utiliser la nudité pour lutter contre le patriarcat – m’a toujours laissé un sentiment de confusion. D’un côté, je me réjouis que les femmes reprennent et revendiquent le contrôle de leurs corps, dans une société qui les traite comme des objets aux mains des hommes, en toutes circonstances (célébration de la virginité, crimes d’honneur, lois religieuses misogynes…). Mais de l’autre j’ai toujours trouvé absurde, douteuse, la polarité forcée que cela crée entre femmes voilées et femmes surexposées. Comme si le patriarcat nous demandait, à nous femmes : « Alors, vous avez décidé ? Les seins ou la Burqa ? Il faut choisir. » Comme s’il n’y avait pas de troisième option.
En ce qui me concerne, je choisis de ne pas choisir. Je trouve ces deux stéréotypes sexistes, humiliants et contre-productifs. Et je trouve que la prétendue opposition entre eux n’est qu’une illusion d’optique : ils sont les deux faces de la même pièce, celle du patriarcat. La première fait de la femme un objet de tentation à utiliser ; la seconde un objet de tentation à éliminer. C’est pourquoi, malgré tout mon respect pour Femen et pour leur lutte, et malgré mes positions très progressistes en matière de sexualité en général, et de sexualité féminine en particulier, je reste perplexe devant l’utilisation de la nudité féminine par Femen pour attirer l’attention sur les droits des femmes. Continuer la lecture